Il faisait noir. Il ne voyait rien. Est-ce qu'il était mort? Il remua un peu et un élancement lui parcouru le corps. Il paraissait que les morts ne souffraient pas. Il devait donc être encore en vie. Mais pourquoi ne voyait-il rien? Peut-être qu'en ouvrant les yeux...
Maxime ouvrit les yeux et les referma aussitôt, aveuglé par le soleil. Il les entrouvrit et une fois habitué à la lumière, les ouvrit complètement sur le grand ciel bleu sans nuages au-dessus de lui. Il se redressa péniblement sur ses coudes, comme courbaturé après trop de sport. Il fit un tour d'horizon. Il se trouvait dans une plaine. Il y avait de l'herbe haute et drue partout autour de lui et sur une grande distance. Plus loin presque à la limite de son champ de vision, il aperçut une forêt. Étrange, il n'y avait pourtant pas ce genre de prairie prêt de Gatineau...
Il entendit un grognement prêt de lui qui l'arracha à son exploration visuelle. Il se redressa complètement et regarda dans les herbes devant lui et vit Léo et Camille qui était étendus inconscient. Avant qu'il ait eu le temps de s'inquiéter, Léo grogna à nouveau et commença à se réveiller, suivit de près par Camille. Rassuré, il se leva et regarda autour de lui et vit Clara et Simon qui étaient couchés derrière lui.
"Aïe! Mais qu'est-ce qui c'est passé? fit Léo en se redressant.
-Je sais pas trop, répondit Maxime en se relevant pour aller secouer ses cousins pour les réveiller, je me souviens juste qu'on regardait le truc dans l'atelier, puis il y eu un paquet de lumière, quelque chose m'a poussé dans le dos et j'ai finit par perdre connaissance.
Camille, qui aussi relevée se tenait la tête.
-Ouille, quelle migraine." Elle se secoua la tête et se passa une main dans les cheveux. "Il me semblait qu'on avait pas trouvé l'alcool, alors pourquoi je me ramasse avec un mal de tête comme si j'avais vraiment trop bu?
-On ne sait pas trop, lui dit Léo, en fait, on ne sait pas grand chose. Où est-ce qu'on a pu arriver, et comment?
-Pour le où, j'en sais pas plus que vous, répondit Camille, et pour le comment, je me souviens juste d'avoir entendu crier derrière moi et quelque chose ma ensuite poussé dans le dos..."
Se rappelant la scène, les trois plus vieux se tournèrent vers Clara qui se levait avec son frère. Celle-ci se tourna vers eux, puis sursauta d'un coup en apercevant les trois regards accusateurs posés sur elle.
"Qu'est-ce qui se passe? Pourquoi vous me regardez comme ça? On est où? Comment on est arrivé?
-Pour tes trois premières questions, on n'en sait rien, mais pour la dernière, on a une petite idée, dit Maxime accusateur. Juste pour savoir, tu as fais quoi qu'en on est rentrés dans l'atelier de mon père? Nous on a observé la sorte d'Arche mais toi?
-Eh bien... je suis allé voir la sorte de grosse boite en métal avec le tas de boutons et de lumières dessus je crois.
-Et tu as bien fait attention de ne pas y toucher, n'est-ce pas?
-Euh... ben en fait...
-J'y crois pas! Léo leva les yeux au ciel. On est tombé dans ce... truc à cause d'une gamine trop curieuse pour ne pas penser ne pas toucher à quelque chose qu'elle ne connaît pas, s'en est presque pathétique.
-Eh!! J'ai 15 ans je te signale! Je suis pas une gamine! S'écria Clara.
-Je trouverai que tu n'es pas une gamine quand tu ne te comporteras pas comme tel!
-Baissez le ton! J'ai mal à la tête."
Les quatre regards se baissèrent vers Simon qui se relevait tranquillement. Cette interruption détendit l'atmosphère et les calma un peu. Désormais tous éveillés, ils firent le point sur leur situation. Hormis le champ et la forêt à l'horizon, seul se trouvait une arche de pierre d'environ 3 mètres, un peu derrière l'endroit où Maxime s'était réveillé, qui semblait avoir été bâtie très longtemps avant. De celle-ci partait une route en terre battue se dirigeant vers la forêt. Au-dessus des arbres, Léo crut apercevoir des filets de fumée, comme le ferait un feu de camp ou une cheminée. Peu importe où ils étaient, se n'était certainement pas près de leur quartier.
-Bon, fit Maxime pour briser le silence, je ne sais vraiment pas où ou comment on est arrivé ici, mais il faudra bien que l'on trouve quelqu'un pour demander où c'est et trouver un moyen de rentrer chez nous, ou au moins de communiquer avec les parents. Je pense qu'on devrait suivre la route pour essayer de rejoindre les filets de fumée qu'on a vue. S'il y a de la fumée, il y a du feu et il devrait y avoir du monde.
-Je suis d'accord, dit Léo. De toute façon, je ne crois pas vraiment que l'on a d'autres choix, non?
Ils se mirent donc en marche, les trois plus vieux marchant devant en essayant d’apercevoir un signe de vie ou de civilisation, tandis que les deux plus jeunes marchaient derrière en admirant le paysage. Plusieurs minutes de marche plus tard, les jumeaux s'écrièrent en même temps:
"J'ai trouvé !
Les ainés se tournèrent vers eux, intrigués.
-Et vous avez trouvé quoi? lui demanda Léo.
-Ben pourquoi on est ici! commença Clara. C'est super simple: on est... dans un rêve! C'était pourtant évident!
-Tout ceci n'existe pas et vous êtes le fruit de notre imagination! On doit être en train de dormir après la soirée d'anniversaire! Continua Simon.
-D'accord, ils sont devenus dingue, fit lascivement Maxime.
-Le soleil a trop du lui taper sur le crane, ajouta Léo.
-Eh! On est dans mon rêve, alors tu ne m'insulte pas! s'écria Clara.
Elle se tue un instant, l'air contrarié. Puis elle s'adressa à son frère.
-Mais une minute, tu peux pas toi aussi être dans un rêve si c'est le mien. Tu dois aussi en faire partie.
-Pas du tout! C'est moi qui suis en train de dormir!
Leur monologue fut interrompu par Camille qui leur tira à chacun une oreille.
-Aïe! Mais qu'est-ce qui t'as prit de faire ça?
-Non mais vous vous entendez? Je vous signale que l'on ne peut pas avoir mal dans un rêve, alors allumez! C'est déjà pénible de pas savoir où on est, n'en rajoutez pas.
Les deux cadets grommelèrent mais se retinrent de faire un commentaire. Mis à part ce petit incident, les 5 jeunes marchèrent sur la route de terre battue durant une bonne demi-heure avant de prendre une pause, afin de satisfaire les plaintes des deux cadets peu habitués aux efforts prolongés. Après que les cadets aient repris des forces, ils se remirent en routes, mais furent rapidement interrompu par les gargouillis de l'estomac de Simon.
"J'ai faim, on a quelque chose à manger? Questionna-t-il.
-Personnellement, je n'ai rien sur moi, répondit Maxime.
Chacun répondit la même chose, après tout, ils étaient partis alors qu'ils étaient dans le sous-sol après le repas.
-C'est vrai que je commence aussi à avoir faim, je me demande il est quelle heure, fit Camille.
Léo regarda machinalement sa montre et répondit par habitude:
-Il va bientôt être 11h.
-Ta montre fonctionne? Demanda Maxime.
Presque aussi surpris que les autres, Léo regarda sa montre avec plus d'attention.
-Oui, elle fonctionne encore, et d'après elle on est le lendemain de ton anniversaire Maxime.
-Alors on aurait dormi toute la nuit... Bon, c'est bien de le savoir mais sa nous avance pas à grand chose. Comme Simon, on va finir par avoir faim, il faudrait accélérer le pas pour trouver de la civilisation.
C'est donc d'un pas un peu plus rapide et sur les grommellements de Simon en arrière-plan qu'ils repartirent sur la route. Ce n'est qu'un autre 30 minutes plus tard qu'ils atteignirent l'orée de la forêt. Ils firent une autre pause, soulagés d'être enfin sous l'ombre des grands arbres.
"Vous croyez que la fumée que l'on a vue de la plaine est encore loin? Demanda Léo.
-Je dirais qu'on en a encore pour un bon vingt minutes de marche avant de rencontrer quelqu'un, répondit Maxime.
-Oh, vous n'aurez pas à attendre plus longtemps!"
Les cinq amis se retournèrent d'un bond vers la source de la voix. Un homme venait de sortir de derrière un arbre et trois autres étaient en train d'en faire autant. Ils étaient tous habillés d'une bien étrange façon. Ils portaient des tuniques en tissus moulantes sombres qui semblaient sortir du moyen âge, avec par-dessus une sorte de short pâle attaché avec une petite corde et une paire de botte en tissu. Chacun d'eux avait une épée qui pendait à leur côté, sauf le chef qui la tenait à la main, laissant la pointe reposer sur le sol et appuyant négligemment la main sur la poignée. Le plus étrange était cependant ce qu'ils portaient sur la tête. Ils portaient tous un immense chapeau qui leur couvraient entièrement le visage et remontait en pyramide au-dessus de leur tête. Les chapeaux étaient de presque un mètre et on aurait dit qu'un visage avait été dessiné sur le tissu. Mais lorsque celui qui semblait être le chef reprit la parole, le tissu s'anima, comme s'il était le visage:
"Alors, si vous n'avez pas deviné, ceci est un vol tout ce qu'il y a de plus normal. Je vous demanderais de bien vouloir vous délaisser de tous vos biens, kamas, bijoux, armes et autres objets de valeurs, et nous les remettre, dit-il d'un ton moqueur. Ne vous inquiétez pas, aucuns mal ne vous sera fait...
Une lueur malsaine alluma le regard du bandit riktus.
-...du moins, tant que vous ne ferez rien de trop imbécile."
Les cinq jeunes apeurés se tournèrent vers la route, mais un autre bandit battit comme une armoire à glace, l'épée à la main, s'était mis en travers du chemin. Un autre avait coupé leur retraite par l'entrée de la forêt et deux autres sortaient de l'autre côté de la route. Voyant toutes portes de sortie fermées, Maxime opta pour la diplomatie:
"Euh... désolé de vous décevoir, mais nous n'avons rien de précieux. En fait, nous n'avons absolument rien et ne savons même pas où nous sommes.
-On ne me le fait pas ce coup là! répliqua celui qui semblait être le chef de la bande. Allez, sortez la marchandise que l'on en finisse.
-Mais puisqu'on vous dit que l'on n'a rien! Répliqua Léo.
-C'est ça, c'est ça, et moi je suis Ogrest! On vous a vu prendre le zaap! Vous ne me direz pas que vous pouvez vous donner le luxe de prendre le zaap et que vous n'avez rien!
Devant la mine étonné et incompréhensive de ses victimes devant ses propos, le ton du riktus se fit plus dur.
-Bon, tan pis. On vous a proposé la manière douce, mais si vous refusez, il va falloir y aller par la force."
Le riktus releva son épée pour la pointer devant lui pendant que ses compères s'avançaient peu à peu, refermant tranquillement leur étau, un sourire mauvais sur le visage. Léo et Maxime se placèrent dos à dos, Camille, Clara et Simon entre eux, et étendirent les bras pour les couvrir dans un futile geste de protection. Soudain, un bruit sourd se fit entendre de la route avançant dans la forêt. Les bandits s’arrêtèrent et regardèrent sur la route pour voir l'armoire à glace qui l'avait bloqué étendue sur le sol face contre terre. Aussitôt, le même son se fit entendre à l'opposé et ils virent un autre riktus étendu sur le sol. Le chef de la bande regarda rapidement autour de lui et aperçu la silhouette qui arriva derrière un autre de ses hommes pour l'assommer rapidement et disparaître aussitôt. Encore deux autres riktus subirent le même sort, ne laissant que Le chef et deux de ses hommes qui étaient sortis avec lui de derrières les arbres.
L'homme qui avait assommé tout ces assaillants réapparu devant les jeunes abasourdis. Il était assez grand, une tête de plus que Léo et Maxime, et doté d'une musculature saillante absente de la moindre once de graisse. Il portait pour seuls vêtements un short en partie déchiqueté composé de plusieurs couches de tissus beige et rouge retenu par une corde attaché en guise de ceinture. Il portait des sortes de bandages blanc usés sur ses pieds nus et un bandeau rapiécé couvrait ses cheveux roux. Son torse nu ainsi que son bras gauche étaient recouverts de tatouages sombres formants des lignes abstraites et cœur fendu sur sa poitrine. Il portait aussi un grand sac-à-dos de cuir épais qui semblait rempli de gros objets. Lorsqu'il se retourna vers eux, le petit groupe aperçut qu'il portait aussi un tatouage en forme de croissant de lune sur l'oeil gauche et une larme sous l'oeil droit. Mais ce qui les stupéfia le plus furent ses yeux: ceux-ci étaient entièrement blancs, sans la moindre pupille ou le moindre iris.
"Est-ce que ça va? Demanda le nouveau venu.
-Euh... oui. Ça va, répondit Maxime
-Bien.
L'homme tatoué se retourna vers les trois bandits restant. Le chef sorti de son mutisme et s'exclama:
-Mais tu es qui toi? Qu'est-ce que tu viens faire dans nos affaires?
-Vos affaires? Vous détroussez des voyageurs et vous me demandez ce que je viens faire dans vos affaires? C'en est presque drôle.
-Drôle? On va te montrer si c'est drôle."
Les trois riktus s'approchèrent de l'homme qui avait déposé son sac par terre et s'était avancé au devant d'eux. Avant qu'ils n'aient pu réagir, il s'élança sur eux et assomma rapidement les deux sous-fifres avant de s'attaquer au chef. Dernier debout de la bande et meilleurs combattant, il réussit à tenir tête un peu plus longtemps en tenant son adversaire à distance avec des coups d'épée paniqués. Occupés à regarder le combat, aucuns des cinq jeunes ne vit un des bandits riktus préalablement assommés se relever derrière eux et, voulant garder l'honneur sauf, s'avancer vers eux avec son couteau. Ce fut le cri d'alerte que fit leur sauveur qui les fit regarder. Maxime, encore derrière Camille et les jumeaux, eut à peine le temps de lever les bras en voyant la lame descendre vers son visage et fermer les yeux en attendant le coup.
Coup qui ne vint pas. Maxime rouvrit les yeux et vit un étrange disque bleuté aux contours irréguliers, dans lequel la main du riktus était plongée jusqu'au coude, mais ne ressortait pas de l'autre côté. Aussi interloqué que lui, tous les autres présents fixaient le coude du bandit qui finissait dans le vide. Celui-ci ramena vivement son bras qui sortit intact du disque, qui disparu quelques secondes après. Ce fut l'homme tatoué qui reprit le premier ses esprits et se débarrassa rapidement de son adversaire distrait d'un bref coup sur la tête. Puis, il envoya son bras dans la direction du riktus restant, comme s'il voulait frapper dans le vide, mais un autre phénomène tout aussi étrange que le disque se passa: les tatouages sur son bras gauche s'animèrent, se détachèrent de son bras et vinrent frapper le bandit interloqué qui revola entre les arbres.
Une fois ses tatouages remis à leur place, il s'avança vers les jeunes qui le regardaient avec un mélange de crainte et de gratitude et lorsqu'il parla, sa voix démontra autant son incompréhension que sa suspicion:
"Mais qui êtes-vous donc?"
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