«Daniel réveille-toi... Daniel...»
Cette voix rappela l'interpelé d'une profonde inconscience.
«-Daniel...
-Hum...
-Tu vas bien au moins? Daniel...
-Hum...
-Réveille-toi... Pas fait tout ça pour rien...
-Mmh...
-Debout... Tu n'es pas mort.
-Hum...
-Debout flemmard!»
«Dis-moi ce maudit nom!»
Mais pourquoi donc avait-il voulu le savoir... Dans un murmure, le Challengeur avait exaucé son souhait. Puis s'était fendu d'un grand sourire. Xan comprenait parfaitement pourquoi. En un mot, il s'était vengé de deux ravisseurs sur trois. Car le sacrieur ne pouvait que fuir à présent.
Les rues de la ville du vice défilaient devant ses yeux. Des assassins proposaient leurs services à tarif réduit, des voleurs vous vendez un cambriolage en prenant votre bourse, des alchimistes offraient une potion de furoncles pour tout achat de trois jus de cerveaux de Bwork. Le sacrieur les bouscula, s'attirant par le fait de lourds regards meurtriers et des accusations de vol à la tire dont il n'avait que faire.
Au milieu de cette ambiance joyeuse, une silhouette se dressa devant lui. Xan ne put faire qu'un geste. Le nom qu'il hurla se perdit dans le brouhaha de la foule.
Le temps se figea lui ôtant ainsi toute chance de fuir et, accessoirement, de survive…
«Alors mon chou, tu viens? Allez, le chemin n'est plus très long.»
Saurek sourit avec un air béat à l'éniripsa qui le tenait par la main. Celle-ci reprit la route avec le féca.
«Tu n'es pas très bavard toi, remarqua Miss Étincelle. Quel est ton nom?»
Celui qu'elle tenait par la main osa lever la tête malgré sa timidité toute nouvelle et atteint vit le sourire engageant de l'éniripsa.
«Tu n'as qu'à me parler de ta famille.
-D'accord, répondit Saurek encouragé par le ton maternel de la femme magnifique. Vous savez, ma famille m'a abandonne dès la naissance de mon horrible frère. Ce n'est pas très beau à entendre.
-Ça ne fait rien, on peut toujours trouver mieux. Tu peux me tutoyer si tu veux.
-Merci madame!»
À entendre le ton de sa voix, un observateur quelconque aurait pu croire que son plus grand vœu venait d'être exaucé.
«Appelle moi Miss Étincelle, je préfère. Continue à me raconter ton enfance s'il te plaît.
-Mais elle est très triste, je ne voudrais pas vous faire pleurer, surtout pas.»
Miss Étincelle s'arrêta et regarda le Saurek dans les yeux en le prenant par les épaules :
«J'ai moi aussi connu des horreurs. Un homme qui m'a séduit a tué mon fils. J'ai vu Mica mourir sous mes yeux, éventré par son père.»
Une perle glissa sur une joue parfaite.
«Oh.»
Le féca n'avait rien trouvé de mieux à dire. Aussitôt, il se sentit coupable. "Oh" c'était bien peu. Il aurait volontiers troqué sa place contre celle d'un vers pour se cacher. Il ne pourrait plus jamais se regarder en face.
«Ne t'en fais pas, ça va passer. Mais c'est juste que depuis, quand je vois un superbe enfant comme toi, je me rappelle mon Mica.»
Saurek rougit sous le compliment.
«Fais moi plaisir, reprend ton récit, demanda l'éniripsa en essuyant la goûte sur sa joue et en reprenant la marche.
-Au début, j'aimais ma mère. Puis son idiotie l'a rattrapée. Elle a provoqué un Maître de Clan pour une question aussi futile qu'elle était imbécile. Le Maître lui a coupé une jambe et l'a enlaidit. Même si elle était déjà bien moche avant, révéla le conteur. En rentrant, elle m'a giflé et a demandé à mon père un autre enfant. À la naissance de celui-ci, ma mère m'a frappé avec une telle force que j'ai manqué d'être décapité. Mon père m'a attrapé et projeté dehors. Une jambe cassée. Heureusement, j'ai pu revenir sinon les voisins auraient fait des histoires. C'est à ce moment là que j'ai commencé à explorer les souterrains et à utiliser la magie de l'eau. Mais jamais personne n'a pu remplir le trou causé par la haine de mes parents.»
Il se mit à pleurer. Miss Étincelle s'arrêta, le pris dans ses bras et colla sa tête jais sur sa poitrine.
«Oh mon pauvre. C'est vraiment horrible.»
Appuyant sa tête sur la sienne, elle pleura à chaude larmes elle aussi. Leurs larmes se mêlèrent tel deux ruisseaux en une seule cascade, pour finir en partie sur le sol boueux.
«J'ai perdu mon Mica et toi tes parents. On a tous les deux un abîme au fond de nous. »
Saurek hocha la tête sans cesser de pleurer.
«Si tu veux, je pourrais être ta mère.»
Il la regarda, vit ses yeux si beaux malgré leurs larmes, son sourire plein d'amour et son visage divin. Il hocha la tête.
«Allons Saurek, plus la peine de pleurer, je suis là pour toi maintenant, dit-elle en essuyant ses larmes. Tiens, boit un peu de ça, c'est très bon contre la tristesse.»
Elle lui tendit une petite fiole un peu mouillée à l'extérieur et à demi-remplie. Il but dedans tout en frottant son visage sur la robe de l'éniripsa pour enlever ses larmes. Elle ne fit pas de commentaires. La fiole avait un goût un peu salé.
«Merci, maman. Tu es vraiment la meilleure maman au monde. Qu'est-ce qu'il te ferait plaisir?
-Reprenons notre route mon chou, répondit-elle avec un le plus beau des sourires.»
Et ils continuèrent de suivre les chemins qu'ils avaient suivis en se poursuivant un peu plus tôt.
Deux hommes s'étaient donné rendez-vous dans la salle du Gouvernement de Brâkmar. Le Gouverneur et le Chef des Gardes étudiait les vieux livres empruntés à la bibliothèque :
«L'idée du Boufrog est pas si mauvaise, soutint Rhigalt en ce déplaçant pour poser l'aiguille qui pendait à son armure.
-Sauf que, d'après ces bouquins, il n'a jamais été vaincu. En plus, avec sa puissance colossale, ce remède pourrait être pire que le mal.
-Pas besoin de le battre, juste de l'attirer.
-Je doute que Féca en personne puisse survivre face à ce monstre.
-Juste l'attirer, répéta le xélor.
-Quand bien même quelqu'un le ferait sortir de son antre démoniaque, il pourrait tout simplement foncer sur toutes les troupes. Y compris les nôtres! Et puis si le combat final ne se passe pas au pied de notre volcan, comment l'acheminer? Vous ne songeriez pas à le faire embarquer? Je vous laisse imaginer l'état du bateau.
-Un Zaap fera l'affaire.
-Nous n'avons que cinq Zaaps! Tu ne penses pas à en sacrifier un?
-Mes recherches d'une bibliothèque anciennes pour l'Aiguille de Xélor m'ont mené à un groupe ayant des ouvrages très anciens.
-Les Zaaps n'ont fait que dériver lors du grand Chaos d'Ogrest qui submergea le monde. La plupart ont disparus, rétorqua Wayter. Personne ne sait en fabriquer!
-Il se trouve que mes recherches personnelles sur l'Aiguille de Xélor m'ont mené plus loin que prévu dans les abysses du passé et justement dans le domaine de ce genre de technologies magiques.
-À moins que vous n'ayez trouvé le moyen de fabriquer un Zaap, nous n'en sommes pas plus avancés sur le problème.
-Je ne l'ai pas trouvé. Par contre, une quantité impressionnante d’ouvrages antiques sur les Énergies primaires ont été réunis par certaines personnes. Personnes que j'ai pu identifier et qui pourrait fabriquer une sorte de portail instantané. Mais si vous voulez bien m'excuser, j'ai un rendez-vous important pour notre Garde.
-Une dernière question : que pensez-vous des rumeurs qui prétendent que l’hiver sera assez rude pour faire geler la glace.
-N’exagérons rien. Quand bien même il serait dur, nos silos se remplissent, et Amakna en a une belle réserve. De toute façon, si nous ne survivions pas à la guerre, nous ne verrons pas l’hiver !
- Vous pouvez disposez. À demain lors du conseil.
-Au revoir.»
Le xélor sortit en reprenant la Clef des Constellations qu'il avait déposé près de la porte. Wayter se replongea dans les bouquins jusqu'à que plus aucun bruit ne parvienne à ses oreilles. Une fois bien sûr que personne ne pouvait l'entendre, il s'approcha du mur du fond. Quatre petits coups tapés de la main de l'écaflip résonnèrent de l'autre côté. Le mur pivota et laissa apparaître le neveu du Gouverneur.
«Étrange comme Rhigalt disparaît lorsqu'il doit nous donner des détails, fit remarquer Gorgan J’admets volontiers que notre cher xélor est très doué se rendre indispensable. Je ne remets point en doute ses compétences, mais nous priver de détails est un moyen très subtil de nous obliger à le garder.
-Très bien, une analyse pertinente bien que je ne la partage pas en tous points.
-Pourquoi m'avoir fait venir et espionner vos cogitations?
-Tout d'abord, ne me coupe pas, exigea Wayter. Je voulais que tu sois au courant de ce plan digne d'Écaflip. Le plus grand Quitte ou Double de notre histoire. Libérer une telle bête est une voie désespérée, mais si les troupes ennemies s'avancent chez nous, cette décision sera la seule nous donnant une chance raisonnable de l'emporter.
Ensuite pour que tu comprennes qu'entre gouverner et un lancer de pièce, il n'y a que le temps nécessaire qui change, et encore. Tu gagnes ou tu perds.
Enfin, pour te confier une mission. Tu iras trouver la vielle magicienne dont l'adresse est écrite sur l'enveloppe et tu lui remettras cette lettre. Il me faut sa réponse dans moins d'une semaine! Le nouvel impôt que j'ai levé m'a rapporté suffisamment pour te payer un voyage rapide. Prend cette bourse; son espace magique fonctionne comme un Havre-Sac : elle contient l’équivalent de trois coffres d'or. Il y a une potion de rappel réglée sur cette salle. Des questions?»
Gorgan secoua la tête.
«Alors cours!»
Des Gardes patrouillaient de long en large toutes les zones. Depuis l’attentat contre son Gouverneur, Amakna avait multiplié par trois les récompenses données pour la capture des bandits. Le résultat était fort fâcheux pour Iclafipartare puisqu'on ne pouvait plus faire dix pas sans être contrôlé. Aller d'un bout à l'autre le Prairie Fertile lui avait pris toute la journée au lieu d'une demi-heure en temps normal. Il devait sa survie à sa seule bonne étoile. Or, cette dernière n'était pas infaillible et risquait de le lâcher à tout moment. Il allait devoir se débrouiller autrement pour réussir son coup.
Iclafipartare voyait non loin devant lui le petit pont qu'il comptait faire sauter. Après celui-là, un seul Zaap et la zone sécurisée serait coupée de la terre ferme. Cependant, en y réfléchissant, son plan était audacieux. Beaucoup trop audacieux. Une bonne trentaine de Gardes surveillait le pont. Il ne pouvait réussir. Sur sa droite, auprès de la ligne d'horizon, il entrapercevait le pont menant au territoire de Shika, aussi bien gardé. Sur sa gauche, un ballon géant en forme de Bouftou et protégé par un escadron de iops en uniforme. Derrière lui, rien d'autre que la prairie géante qu'il avait eu un mal fou à traverser. Son plan était fichu et en plus deux Gardes venaient vers lui. C'en était fini de sa carrière s'il n'avait pas une idée de génie d'ici à trente secondes.
«Eh là! Monsieur le roublard, passeport s'il vous plaît!»
Quelques secondes...
«Vous êtes sourd ou quoi? Passeport!»
L'idée illumina ses pensées tel un éclair. Le tempo était juste mais gérable. Glissant la main dans sa poche, il s'adressa au Gardes :
«Excusez-moi, je rêvais.
-Passeport!
-Attendez, j'ai un petit cadeau pour vous.
-Tu tentes de nous corrompre avec de simples pièces?
-Je crois que j'ai bien mieux que des Kamas.»
Deux pistolets apparurent dans les mains du roublard, un par Garde. Ceux-ci n'avaient pas encore touché le sol qu'Iclafipartare courait déjà vers l'objet de son nouveau plan.
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20/07/13 - Fin de ce premier Carnet!