"Bonne nuit, Rémiro.
- Bonne nuit, Auriny."
Le calme était revenu dans la maison de Simon. Un peu plus tôt, des policiers étaient venus suite aux appels du garçon, et ont emporté les corps de Renée, Tanthane et Léossier. Ils n'étaient pas de la police fédérale, alors Simon a très fortement insisté pour pouvoir attendre la venue même d'Antoine. L'agent était, selon lui, la seule personne restante en qui ils pouvaient faire confiance. Bon parleur, l'enutrof a facilement convaincu les policiers, et ceux-ci sont repartis sans demander leur reste.
Cette journée les avait tous épuisé.Simon invita Rémiro à dormir dans sa chambre, et il fut attribué la chambre des parents à Auriny. Le garçon, pour sa part, a prévu dormir sur le canapé du salon, dans lequel il y a un matelas plié. Auriny avait pris une douche, s'était habillée pour la nuit, et était maintenant toute seule dans la chambre.
Le frisson d'une brise passa sur sa peau. Elle se tourna vers la fenêtre, qui était encore ouverte. Se laissant bercer par le vent, elle déploya ses ailes et s'envola hors de la maison. Elle atterrit délicatement sur le toit, s'assit en accotant sa tête à la cheminée. Elle contempla le ciel, restant subjuguée pendant plusieurs secondes par le ciel étoilé. L'eniripsa sortit un petit carnet de sa poche, sur lequel était accroché un crayon et une gomme à effacer. Elle commença à écrire:
Cher journal. Désolé si ce début est si peu original, mais tu sais, c'est comme ça que je veux t'appeler. Certains ont des amis imaginaires, d'autres préfèrent oublier. Si je t'ai créé, c'est justement pour ne pas oublier. Tu es mon ami imaginaire à moi.
J'aimerais que tu deviennes mon confident. Quelqu'un à qui je peux m'adresser, confier mes moindres secrets, sans me faire juger ou critiquer. Oui, peut-être, il y a Rémiro. Je l'aime beaucoup, c'est mon meilleur ami, mais... Je ne crois pas qu'il est capable de prendre conscience de ce que je lui raconte, il est beaucoup tête-en-l'air. Selon ce que j'ai vu de lui ces jours-ci, je comprend maintenant pourquoi mes parents me traitaient de tête de iop. Papa, maman... Comme j'aimerais que vous soyez là pour m'aider!
À ma droite, il y a les restes de ma maison. La reconstruction est déjà bien avancée. Selon mes souvenirs, le sous-sol a été complètement détruit par le combat de mon père. Toutes ces choses... J'ai un peu honte de ne pas avoir entièrement raconté à Rémiro. Mais il n'aurait pas compris de toute façon. Tout ce qui l'intéresse, c'est l'action, le combat. Il n'aurait pas pu comprendre l'importance de tous ces objets qui étaient les derniers résidus du Monde des Douze que gardaient mes parents... Dommage qu'ils n'aient pas eu le temps de m'en dire plus.
Je me demande qui y habitera. Les machines sont passées, ont retourné la terre et ont cimenté les fondations. Les vieilles breloques ont été jetées ou détruites. Pourtant, en cette nuit tranquille, j'y sens encore une présence. Cette endroit dégage encore une énergie... indescriptible. La présence de mes parents? La mémoire de mon ancienne vie? C'est le même type d'énergie que je sentais dégager cette mystérieuse fleur bleue. Mais peut-être que je suis paranoïaque, aussi. Il n'y a plus rien, je le sais.
Tu sais, cher journal, je m'inquiète beaucoup, surtout depuis que madame Walker est morte. Nous n'avons que rarement passé une journée sans que quelqu'un veuille nous tuer. Pourquoi? Qu'est-ce qu'on leur a fait? Lorsque je regarde les étoiles, je me demande si notre monde, notre peuple, se trouve quelque part là-haut. Et je me dis aussi que, si tous ses habitants sont comme leurs assassins qui sont sur Terre, je n'ai pas envie d'y aller!
Je m'inquiète pour Lily aussi. Après tout, si des gens ont été envoyés pour nous liquider, elle aussi a sûrement été attaquée. Pauvre Lily... elle est si jeune, et elle a déjà perdu ses parents et sa sœur. Depuis que j'ai découvert mes origines, toute ma vie s'est transformée en stress et danger. Avant de mourir, Chloé avait parlé d'une osamodas. À en remarquer l'attitude de madame Walker, cette femme se serait introduite à l’insu de tous sur Terre. Et à en voir l'état de Chloé, je doute qu'elle soit de notre côté... Et cet Andyspak! Oh mon dieu, il me fait trop peur!
Il nous reste qui, maintenant? Antoine? Il est plus en danger que nous, puisqu'il n'a aucun pouvoir. Simon aussi semble avoir perdu les siens... Tiens, ça me fait penser à autre chose. Qu'advient Bryan? J'espère que les recherches policières vont bientôt le retrouver, ses parents doivent s'inquiéter. Bon, je te quitte pour ce soir, il y a quelque chose que je veux faire.
Auriny ferma son journal, puis se ré-envola. Elle rentra dans la maison par la fenêtre, puis la verrouilla sans bruit. Elle fit de même avec la porte, après avoir vérifié que Rémiro dormait bien dans la pièce d'à côté. Son regard parcouru sa chambre. "Où est-il... Ah, le voilà!" Le havre-sac de Jack était toujours ouvert, sur la commode où on l'avait laissé. "Je dois vérifier..."
Un vortex de lumière l'enveloppa, puis elle disparut.
___
Lily Siméas était étendue dans l'herbe. Elle était épuisée, beaucoup trop pour tenter de se relever. Morte de fatigue, elle ferma les yeux. Ses muscles étaient vidés de toute énergie, et il lui sembla tomber lentement dans les vapes... quand soudain, une force inconnue la souleva du sol. Intriguée, elle ouvrit légèrement les paupières. Un homme, qui arborait une chevelure rousse, la portait dans ses bras. Ses vêtements étaient d'un blanc éclatant.
"Bonjour monsieur, salua-t-elle timidement.
-Bonjour Lily."
La sadida se sentait bien. L'homme parlait d'une voix douce et franche. Ses yeux regardaient dans le vide, d'un air triste et profond. De ses pupilles rouges Lily distingua un petit éclat blanc. Aussitôt, elle sentit ses forces lui revenir. Elle passa ses mains autour du cou de son porteur.
"C'est vous qui m'avez soigné? demanda-t-elle.
- Oui."
L'étranger n'était pas très bavard. Lily lui sourit. Il n'eut l'air encore que plus triste. L'homme la porta jusqu'à l'intérieur de la maison. Ils passèrent par la cuisine, puis montèrent les escaliers. Ils entrèrent dans une petite chambre, puis l'inconnu déposa la petite fille dans le lit. Lily s'assit, et le regarda partir. Il ne dit rien. Il avait presque passé le cadre de la porte, quand la petite voix de la sadida se fit à nouveau entendre:
"C'est quoi votre nom, monsieur?
- Je ne peux pas te le dire, répondit Andyspack.
- Pourquoi?
- Parce que tu risques de ne pas être fière de moi si je te le dit.
- Mais pourquoi?
Le zobal s'assit sur un tabouret à côté du lit.
- J'ai fait de très vilaines choses. Tu sais, je ne suis pas une bonne personne.
- Comment pouvez-vous dire ça? dit Lily en fronçant les sourcils.
- Tu ne sais pas ce que j'ai vécu. Ni ce que je m'apprête à faire. Je fais du mal, Lily. Et ce n'est pas toujours moi. Mon vrai moi. Il n'existe plus. Et je ne veux pas que tu me juges de cette façon, c'est pour ça que je ne veux pas te dire mon nom.
Lily eut un petit rire joyeux.
- En tout cas, moi je sais que vous n'êtes pas méchant.
Le zobal la regarda, surpris.
- Pourquoi dis-tu cela?
- Parce qu'un vrai méchant ne m'aurait pas soigné. Un vrai méchant ne m'aurait pas pris dans ces bras, et ne m'aurait pas transporté dans ma chambre.
- Tu ne me connais pas...
- L'important n'est pas visible de l'extérieur. Ce n'est pas tes actions qui décident de ce que tu es. La vérité se trouve là.
Elle se mit à quatre pattes et se pencha pour poser sa main sur le torse d'Andyspack,
- Moi je sens que vous avez un bon cœur, monsieur. Et je sais que, quelles que soient vos actions, elles sont et seront toujours accomplis avec votre cœur."
Elle se rassit sur le matelas. Les yeux du zobal s'embrouillèrent de larmes. Il dévisagea la petite fille. Elle était si innocente, avec son grand sourire. Tout le monde a toujours eu peur de lui, sauf elle. Une exception qu'il ne rencontrait que rarement. Il dit sur un ton triste:
"Tu as toujours été trop douce pour moi, Lily. Je ne le mérite pas.
- On se connait?
- Je t'ai fait une promesse. Je vais la tenir."
Le zobal leva son bras. De son index, il traça une ligne sur le front de Lily. La petite bailla, sentit ses paupières lourdes, puis les ferma complètement, s'endormant sur le coup. Délicatement, Andyspack l'abria de sa couverture. Il la contempla longuement. Dans la paume de sa main, il fit apparaitre un petit collier, auquel était accroché une petite pierre blanche lumineuse. Il la mit au cou de la sadida, éloignant les cheveux verts de son visage.
"Si je suis venu te revoir, c'est parce que je sais que ça sera pour la dernière fois. Je te fais mes adieux, et mes excuses. Tu as raison. Tu as toujours eu raison. Et j'ai eu tors. Mais maintenant, il est trop tard. Je suis pris dans une boucle, exactement comme tu m'avais averti. J'aurais dû t'écouter quand il était encore temps... Je dois m'en sortir. Je dois la détruire."
Andyspack se leva, et se dirigea vers la sortie. Juste avant de franchir la porte, il se retourna. Des gouttes coulaient sur ses joues.
"Dors bien, ma petite Lily. Aujourd'hui, tu as été la meilleure. Demain, le monde aura changé. J'espère que tu me pardonneras..."
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